Évolution, par Pierre Wittmann
Toute évolution exige des transformations. Et tout ce qui n’évolue pas, dégénère et meurt. On peut donc se demander, en observant la nature, la société, l’espèce humaine, si nous sommes actuellement dans un processus d’évolution ou de décadence. On peut se poser la même question en s’observant soi-même. Mon idée est que le tout évolue, mais que certaines parties de ce tout, celles qui ne servent pas, ou plus, l’évolution, dégénèrent et disparaissent. On observe dans tout processus d’évolution que les éléments individuels, par leur dégénérescence et leur mort, permettent l’évolution de l’ensemble, et la naissance de nouveaux éléments plus évolués et plus performants que les anciens. Ce qui ressemble à une décadence ou un retour en arrière apparaît, à un autre niveau, comme une crise de croissance.
Tout changement est la résultante de deux forces antagonistes, une qui va dans le sens du progrès et de l’évolution – qui irait trop vite si on la laissait agir seule – et une qui va dans le sens de la conservation et de la résistance – qui s’autodétruirait si on la laissait agir seule. Un équilibre subtil de ces deux forces produit une évolution graduelle qui permet l’intégration progressive des changements. Cet équilibre est cependant fragile et des périodes d’évolution rapide succèdent à des périodes de stagnation et d’intégrisme. Ainsi, si on la regarde de près et dans son développement à court terme, l’évolution semble instable, chaotique et précaire. Par contre, si on prend du recul, on verra qu’à long terme elle est régulière, cohérente et harmonieuse. Par ailleurs, les progrès rapides dans un domaine coïncident souvent avec des blocages dans d’autres. Il en résulte de fortes turbulences.
Je crois que c’est ce qui se passe en ce moment dans l’évolution de notre société sur la planète Terre, ainsi que dans l’évolution personnelle de beaucoup d’êtres humains. Les progrès technologiques et la croissance matérielle sont très rapides, poussés par la croyance qu’ils sont la solution à tous les problèmes. Cette croyance est contraire à toutes les sagesses ancestrales et l’expérience donne une preuve éclatante de son caractère erroné. L’argent ne fait pas le bonheur, et le progrès matériel non plus. Il bloque le développement spirituel de la société et celui de domaines tels que l’éducation, la politique, la protection de l’environnement, la santé, le développement de nouvelles énergies, la résolution des conflits, la distribution équitable des besoins vitaux, l’information objective, la qualité de la vie.
Les pays les plus riches matériellement sont aussi ceux qui connaissent les taux les plus élevés de maladies physiques et mentales, de criminalité, de pollution, de conflits en tous genres. Ce sont ceux où l’on consomme la plus grande quantité de nourritures et de substances toxiques, où les émotions négatives telles que la peur, le stress et l’anxiété sont les plus répandues, où l’on compte le plus grand nombre de prisons, d’hôpitaux, d’asiles psychiatriques, d’avocats, de divorces, de suicides… Ceux où le vrai bonheur est le plus difficile à trouver.
L’erreur n’est pas dans la technologie et les biens matériels eux-mêmes, mais dans l’usage qu’on en fait, ainsi que dans les buts et les motivations qui sous-tendent cette croissance effrénée. Une minorité cherche à acquérir un maximum de profits afin d’établir son contrôle et son pouvoir sur toute la société. On pourrait très bien utiliser ces mêmes progrès technologiques et cette même richesse matérielle pour développer tous les secteurs cités plus hauts, qui sont actuellement bloqués dans de vieux schémas. Et offrir la qualité de vie à tous au lieu de réserver la quantité à une élite. Car les idées, la technologie et la vision qui permettraient la transformation et l’évolution harmonieuse de la société existent ; elles sont prêtes à être mises en œuvre. Il ne leur manque que l’attribution des crédits nécessaires et le feu vert des gouvernements.
Pour en arriver là, il faut que ces projets soient soutenus par l’opinion publique dans son ensemble ; et que celle-ci s’éveille et cesse de se laisser manipuler par les puissances au pouvoir. Ce changement ne peut provenir que de l’éveil de chaque individu, de sa propre transformation. Chacun doit se poser la question de savoir s’il est complètement satisfait de sa vie, de sa santé, de son travail, de son environnement, de ses rapports avec ses proches et avec la société. Si oui, qu’il partage sa façon de vivre avec ceux qui ne sont pas aussi heureux que lui. Sinon, qu’il trouve ce qu’il pourrait changer dans sa vie pour la rendre plus harmonieuse, plus paisible, plus enrichissante. À notre époque, il existe de nombreuses ressources pour nous aider dans notre transformation personnelle. Chacun de nous peut commencer aujourd’hui à changer, pour créer la société de demain.
Ce texte est un chapitre du Guide du bonheur pour le troisième millénaire, de Pierre Wittmann.