UN MONDE SANS ARGENT

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Une société sans leaders

1236 Plénitude

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Si j’ai bien compris, le projet Mocica a l’intention de créer un système politique hyper-démocratique, l’ODG (organisation démocratique globale), où il n’y aura plus de leaders ni de dirigeants, mais seulement des assemblées citoyennes. Est-ce que cette ODG ne va pas constituer un système administratif encore beaucoup plus lourd que le système actuel, et beaucoup moins efficace, puisqu’il sera constitué en grande majorité de gens incompétents. J’ai expérimenté ce genre de groupes il y a une quinzaine d’année, alors que voulais créer une communauté écologique en France. Je me souviens de discussions interminables qui ne menaient en général à rien et à aucune décision concrète. D’ailleurs, aucun de ces projets n’a vu le jour.

Le fait de supprimer l’argent est une chose, à laquelle j’adhère tout à fait, mais l’instauration d’un nouveau système social et politique en est une autre. Le système actuel est loin d’être parfait, mais il a aussi des qualités qui ont fait leurs preuves, et qu’il n’y a pas lieu de rejeter systématiquement. Il y a différents caractères humains, qui ont chacun leur rôle et qui se complètent pour créer une harmonie globale et un fonctionnement efficace de la société. Il y a des leaders et il y a des suiveurs. Si on enlève les leaders et qu’on demande à des assemblées de suiveurs de diriger, ne va-t-on pas vers une catastrophe ?

Chefs et hiérarchie

Il y a de nombreux groupes humains qui, pour fonctionner harmonieusement et efficacement, ont besoin d’être dirigés par un chef, secondé dans bien des cas par des personnes organisées selon un système hiérarchique. Les exemples sont multiples. Le capitaine d’un navire, seul maître à bord après Dieu dit-on, est celui qui a les plus grandes capacités pour mener le navire à bon port, et il doit pouvoir prendre des décisions rapides en cas de danger. Si, dans l’urgence, il doit convoquer une réunion des marins qui vont discuter pendant des heures en se passant un bâton de parole, le navire aura peut-être coulé avant que la discussion soit finie. La situation est la même pour le commandant de bord d’un avion. 

Un architecte dirige la construction d’un bâtiment, c’est lui qui a conçu les plans, qui connaît les moyens et les entreprises disponibles, et qui conduit le projet et le chantier : il est responsable et prend les décisions importantes. Bien sûr, il peut consulter au besoin toutes les personnes impliquées dans le projet, mais il ne va pas convoquer une assemblée chaque fois qu’on doit décider où planter un clou. Il faut aussi un chef pour diriger la cuisine d’un grand restaurant, et il faut un chef pour diriger un orchestre. Là où un chef est le plus nécessaire, secondé par un système hiérarchique pyramidal, c’est pour diriger une armée. Une armée qui part au combat sans un général, des lieutenants et des caporaux se dirige vers une défaite assurée (il faut noter que Mocica considère que les armées seront des institutions toujours nécessaires dans un monde sans argent). 

Les entreprises, celles qui existeront toujours dans un monde sans argent, ne pourront pas fonctionner sans dirigeants. Simplement, le rôle des dirigeants ne sera plus de maximiser les profits pour enrichir les actionnaires, mais de contribuer le mieux possible au bien-être et à la prospérité de la communauté à laquelle les entreprises offriront leurs produits et leurs services. Si la vie d’un petit village pourrait à la rigueur être gérée par l’assemblée des villageois, n’est-il pas utopique de penser qu’on pourrait diriger une ville, un pays ou le monde, sans leaders ? Bien sûr, les rôles des leaders, leurs pouvoirs et leurs responsabilités devront être définis clairement, en leur fixant des limites et des valeurs en accord avec le bien commun. Ils devront en particulier diriger la mise en œuvre et l’exécution des décisions prises par les assemblées démocratiques. C’est ce qu’on appelle, dans le système actuel, le pouvoir exécutif ; il ne peut pas être confié à un groupe informe de personnes de bonne volonté dans lequel personne n’est responsable. La qualité d’un leader est aussi d’avoir une vue d’ensemble de la situation et des problèmes à résoudre.


28 mai 2021, Khanom

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